Fabien Touchard : création contemporaine, chant choral et flamenco

Servir la musique chorale en allant puiser partout où la voix exprime des émotions, telle est la vision que défend Mathieu Romano à la tête de l’ensemble Aedes. La curiosité et l’ouverture sont au fondement du travail accompli par le chœur qui multiplie les collaborations et les créations au croisement de plusieurs univers artistiques et musicaux.

Dans sa dernière création Lamento, avec la célèbre chanteuse Rocío Márquez, Aedes fait se rencontrer les mondes du chant choral et du flamenco autour des œuvres Nuits de Xenakis et Lamento della Ninfa de Monteverdi. Les deux univers se rejoignent et culminent dans une composition pour double chœur, écrite par Fabien Touchard.

Entretien avec Fabien Touchard, compositeur

Comment vous est venue l’idée de cette œuvre intitulée « Una canción de guerra » ?

A l’hiver 2019, peu avant la crise sanitaire, de nombreuses violences se sont succédées en Argentine lors de manifestations qui ont provoqué une sévère répression. Les images de cette répression nous sont parvenues et m’ont touché. J’ai été très touché également de voir se former un orchestre spontané de milliers de manifestants reprendre des orchestrations qui leur venaient tout droit de Paris. Ma pièce est un hommage à ces événements de 2019.

Comment avez-vous fait dialoguer à l’intérieur les deux univers des chants choral et flamenco ?

Lors de l’entrée de la soliste, le chœur forme un tapis sonore très homogène et continu sur lequel Rocio Marquez n’a plus qu’à se poser et à improviser. Il était important de permettre au style libre et flamboyant de la chanteuse de prendre son envol. Le chef donne donc le départ des phrases, mais la partie soliste s’accommode ensuite d’une pleine liberté et se superpose à la partition de choeur que j’ai composée ! La rencontre des deux univers se fait ainsi avec beaucoup de naturel.

Qu’est-ce qui, dans le « Lamento », fait écho à votre quête en tant que créateur ?

De mon point de vue, si quête il y a, c’est celle d’une expression lyrique qui, après avoir été bannie par une modernité artistique de l’après-guerre sous le choc de l’histoire, a pu être réintégrée à l’heure d’une postmodernité désormais acquise. Ainsi, se dégage souvent chez les compositeurs d’aujourd’hui une quête nouvelle de l’expressivité, ce dont je me réjouis. « Una canción de guerra » participe de cette tendance de façon explicite : le caractère expressif de l’hommage à l’Argentine rejoint aisément celle, plus large, du Lamento.

Vous collaborez régulièrement avec l’ensemble Aedes en tant qu’arrangeur et compositeur, qu’est-ce qui, selon vous, caractérise l’écriture de partitions pour chœur a cappella ? Souhaitez-vous continuer à écrire pour la voix à l’avenir ?

Dans l’écriture chorale a cappella, mon soin premier s’attache au rapport au texte, à ciseler les lignes mélodiques, à inscrire cet artisanat dans une atmosphère particulière qui en vaut la peine selon moi. J’enseigne le contrepoint au conservatoire de Paris et on comprendra sans peine mon attachement au chœur ! Par ailleurs j’ai toujours beaucoup écrit pour la voix, lyrique et non lyrique, chorale mais aussi soliste. Mon premier disque proposait plusieurs cycles de mélodies ; le second qui vient de paraître explore une vocalité plus déclamée ou plus « pop », à travers des miniatures où la voix est accompagnée d’électronique. Mêler ma musique à une voix flamenco s’inscrit aussi dans cette démarche. L’exploration de la voix sous toutes ces facettes est passionnante et sans fin, je compte bien continuer !

Littoral, album à paraître le 27 août aux éditions Hortus

 

 

Lamento aux Rencontres Musicales de Vézelay
Samedi 21 août 2021, 21h

Lamento au Théâtre des Bouffes des Nord 
Lundi 4 octobre, 20h

 

 

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